CTSD du lundi 27 juin 2022
Déclaration de la FSU 43
Au terme du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, et au commencement d’un deuxième mandat plus que fragile à en juger par le désaveu qui s’est prononcé dans les urnes, le bilan que l’on peut dresser pour l’école est forcément très critique. Le service public d’éducation ressort extrêmement fragilisé de cinq années marquées par des réformes destructrices des moyens alloués pour nos élèves, mais aussi de l’esprit qui doit fonder l’école de la République.
Premier constat : le métier n’attire plus et nous faisons face à une crise de recrutement sans précédent, où cette année encore, les concours voient le nombre de leurs candidats baisser vertigineusement, à tel point que certains Rectorats procèdent à des opérations de recrutement déplorables : les fameux jobdating absolument déshonorants pour notre profession, en plus d’être inquiétants pour la qualité d’enseignement qui va en ressortir. Les causes de cette crise des vocations ? les rémunérations, tout d’abord : une décennie de gel du point d’indice a engendré la précarisation de tout une profession, quand on pense qu’aujourd’hui, un jeune professeur gagne à peine plus que le SMIC après cinq années d’études. La promesse de revalorisation du point d’indice « avant l’été » promise par une ministre aussi nettement désavouée dans les urnes que son ancien collègue Jean-Michel Blanquer, n’aura pas survécu aux deux campagnes électorales : l’été est là, le gel du point d’indice aura résisté, lui, aux températures caniculaires. Quant aux promesses annoncées hier par voie de presse par le nouveau Ministre, nous voulons répondre que la revalorisation doit être générale et non conditionnées à de nouvelles missions qui ne feraient que dégrader des conditions de travail déjà lourdes.
La crise que traverse notre profession est profonde et ne se limite pas à l’insuffisance des rémunérations : les mutations sont devenues presque impossibles et les perspectives de carrière sont bloquées ; les conditions d’exercice sont de plus en plus éprouvantes avec des services partagés pour de nombreux collègues ; des classes surchargées ; des heures supplémentaires imposées et une inflation d’injonctions managériales qui éloignent les collègues du cœur de leur métier : enseigner, transmettre, élever une jeunesse et lui donner les armes de la raison critique. Tout est à reconstruire sur les bases du pacte républicain d’égalité et d’émancipation.
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Nous regrettons une fois de plus que les documents préparatoires à ce CT n’aient pas été envoyés dans les temps. Il n’est pas normal non plus que nous ayons à les demander. Nous regrettons également qu’aucun projet ne soit avancé et que les rares modifications présentées dans le tableau du 1er degré semblent comporter des erreurs « opportunes ». Ainsi les effectifs de Fay la Trioulère, situation sur laquelle nous vous avons alerté et de Dunières notamment, ne correspondent pas aux effectifs envoyés aux IEN qui, eux, dépassent les seuils. Contrairement à ce que vous affirmez dans votre courrier du 23 juin, plusieurs ouvertures semblent donc se justifier.
Et puisque dans ce même courrier vous nous invitez à un débat large et constructif, nous vous suggérons d’aborder la question des évaluations d’écoles qui inquiète à juste titre la profession. Il serait trop long de détailler ici, mais nous vous alertons d’ores et déjà sur le fait que les collègues seront très réticents vis à vis d’un dispositif chronophage, qui risque de limiter encore plus leur liberté pédagogique, et qui se borne à évaluer le dernier maillon d’une chaîne complète de dysfonctionnements en amont.
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Dans le second degré, dans le département nous manquons de professeurs formés dans bien des disciplines. Trop d’élèves ont été privés, cette année encore, d’une partie de leur enseignement faute de vivier de remplaçants. En atteste un long courrier envoyé au Recteur par la FCPE et la PEEP de la cité scolaire de Brioude: les parents d’élèves s’alarment à juste titre des non-remplacements qui ont amputé une grosse partie des enseignements de leurs enfants tout au long de l’année. Brioude n’est pas une île, malheureusement, et c’est tout le département qui est concerné. En français, en mathématiques, en langues vivantes, les rustines ne suffisent plus : il faut recruter ! Sous Jean-Michel Blanquer, ce ne sont pas moins de 7500 postes qui ont été supprimés, et s’il manque aujourd’hui des professeurs devant les élèves, c’est cette politique qui est à incriminer.
Le SNES-FSU s’est fermement opposé à la réforme du lycée, avec des arguments qui se sont tous vérifiés dans l’application de la réforme, et même parfois au-delà de nos inquiétudes : les enseignements du lycée sont désorganisés, les classes surchargées, la perte de sens est bien là pour les élèves comme pour les enseignants, avec la disparition du groupe-classe et les choix trop précoces et cornéliens de spécialités déterminantes pour la sélection Parcoursup, dont nous demandons toujours l’abrogation. Quant au bac, il n’est plus aujourd’hui l’examen national égalitaire qu’il était mais un diplôme local qui inclut un contrôle continu source de pressions pour les professeurs et d’inégalités pour les élèves : nous demandons donc le retour à des épreuves nationales, ponctuelles, anonymes, seules garantes de l’égalité de tous face au diplôme.
En collège, nous déplorons une explosion, sur plusieurs années, des effectifs par classe : dans trop de collèges de notre département, les effectifs dépassent en effet l’ancien seuil de 28 élèves pour avoisiner voire dépasser les 30 élèves. Dans 7 collèges sur 22, soit presque un tiers des établissements, au moins 1 classe atteint le seuil de 30 élèves ! Notre demande de 24 élèves par classe est juste : elle répond à la nécessaire adaptation à des publics hétérogènes dans un collège unique qui peine à inclure et à faire réussir, faute de moyens humains.
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En somme, c’est toute une école qui est à reconstruire : cette reconstruction doit se traduire par des recrutements significatifs et une revalorisation d’urgence, le dégel du point d’indice et le rattrapage des années perdues, dans un contexte d’inflation galopante qui n’épargne aucune catégorie de personnels – et nous pensons notamment aux plus précaires, AESH et contractuels. La situation de l’école n’est pas sans rappeler celle de l’hôpital : pour que les services publics puissent remplir leurs missions fondamentales, il faut des moyens et pas seulement des discours. Et si le changement de ministre indique certainement un changement de profil et de méthode, nous le répétons : gouverner ne peut se limiter aux symboles.
Hassen Chamakh – SNUIPP-FSU
Thomas Decoeur – SNUIPP-FSU
Louise Pommeret – SNES-FSU