« Avec Jean-Michel Blanquer, pas de trêve sanitaire ! » Ce pourrait être le slogan de celui qui, entre deux protocoles sanitaires improvisés et balancés sur les plateaux des chaînes de télévision, poursuit la destruction du service public d’éducation.

 

Et pourtant, jamais le manque de moyens n’aura été aussi visible ! Jamais les besoins n’auront paru aussi importants ! Car pendant le premier confinement, nous avons vu :

– que l’école à la maison, ce n’était pas vraiment l’école

– que les écrans d’ordinateur ne remplaçaient pas les vrais enseignants

– que, de la maternelle à l’Université, en passant par le primaire, le collège et le lycée, rien ne remplaçait le lien fondamental entre les maîtres, les professeurs et les élèves.

– rien ne remplace ce lien, à tel point que les étudiants manifestent pour retrouver les bancs de leur fac et leurs profs.

 

Fragilisés par des mois d’enseignement en distanciel, les élèves et leurs enseignants ont retrouvé en septembre le chemin de classes bondées : parfois 30 élèves dans les plus petites classes, parfois plus de 30 dans les collèges, 35 ou 36 dans les classes de lycée… alors que nous aurions eu besoin de dédoublements, de recrutements, d’aménagements de locaux, pour travailler en plus petits groupes, à cause du virus mais aussi et surtout à cause de mois de confinement qui ont creusé les inégalités scolaires et sociales.

 

Au lieu de ça, aveugle et sourd à nos remontées, le Ministre poursuit la politique de destruction de postes :

 

– toujours pas de recrutements statutaires dans le premier degré pour pallier aux problèmes récurrents de remplacement.

– 1800 postes en moins à la rentrée 2021 dans le second degré, alors que le nombre d’élèves augmente encore ! cela voudra dire, encore plus de recrutements contractuels, encore plus d’heures supplémentaires pour des enseignants qui n’en veulent pas !

Pour le premier et le second degré, nous disons NON aux destructions de postes ; et OUI aux recrutements statutaires pour toutes les catégories de métiers : pour les enseignants, pour les AED car les vies scolaires sont épuisées, pour les AESH qui accompagnent les élèves en situation de handicap – mais là encore, pas en recrutant n’importe comment, pas en mettant en place des PIAL, qui risquent de précariser encore davantage des personnels déjà suffisamment maltraités.

 

Au-delà des postes se pose le problème de nos rémunérations humiliantes, parmi les plus basses en Europe. Le Grenelle de l’Éducation est une gigantesque farce qui ne trompe personne : la prime d’attractivité du Ministre ne concerne que 30% des personnels aux tout premiers échelons. Et pour les autres ? un plat de lentilles qui se traduit par quelques petites dizaines d’euros alors que cela fait des années que l’on organise la prolétarisation du métier. Là encore, des catégories entières de personnels sont oubliées : rien pour les AESH, rien pour les AED. Et la fameuse prime informatique de 150 euros par an dont les enseignants documentalistes et les CPE se voient privés ? peut-être ne sont-ils pas eux-aussi enseignants ? Nous invitons notre ministre à faire un tour dans un magasin de matériel informatique pour constater qu’avec 150 euros par an, nous n’irons pas bien loin : et pourtant, durant les mois de confinement, et même en temps normal, les enseignants ont fait cours sur leurs propres deniers, en utilisant leur propre matériel, ordinateurs, imprimantes, ou autre.

Est-ce comme cela que le Ministère compte redorer le blason d’une profession déjà bien écornée ? est-ce comme cela qu’il compte attirer les étudiants vers les métiers de l’enseignement ?

 

Enfin, le Ministre poursuit ses réformes : et quelles réformes ! Des réformes idéologiques qui soumettent l’école à des cadences et des principes qui n’ont rien à voir avec les valeurs qui nous animent.

 

– la loi sur la direction d’école est dictée par une idéologie de management qui entend diviser les personnels en donnant un peu à une minorité et rien au reste (62% des écoles n’obtiennent aucun temps supplémentaire de décharge pour la direction d´école). Que demandent nos collègues en charge de direction ? du temps, une meilleure rémunération, et bien sûr une simplification des tâches devenues de plus en plus complexes.

– pour ce qui est du second degré, c’est aussi une idéologie néolibérale qui s’est emparée des bureaux de notre ministère, et dont l’exemple le plus éclatant est sans doute le nouveau lycée Blanquer : un lycée où des élèves déboussolés deviennent des consommateurs-zappeurs et où le lycée devient un vaste supermarché. Tous les cadres explosent : à commencer par le plus symbolique, le baccalauréat, jadis premier grade universitaire et rite de passage. Nous demandons le retour à des épreuves terminales, garantes de l’égalité entre tous les lycéens.

 

Il y a un dénominateur commun de toutes les réformes qui s’abattent sur l’école, de la maternelle au lycée : l’école Blanquer est une école de la performance, de l’évaluation permanente. Notre Ministre est obsédé par les tests et les classements, et bientôt on va préparer des élèves de maternelle à réussir des tests en CP ; tout comme on fait du lycée une gigantesque machine à évaluer tout au long de l’année. Laissez-nous enseigner ! Laissez-leur le temps d’apprendre ! À l’école de l’individualisme, nous opposons celle de l’humanisme. À l’école de l’évaluation, nous opposons celle des savoirs émancipateurs, durables, indispensables à la formation d’un esprit critique. Nos élèves ne sont pas des poulets en batterie, cessez de les broyer et cessez de nous broyer : donnez-nous du temps, donnez-nous des moyens, donnez-nous de la considération, morale et salariale !